Message des représentants CGT, FO, SUD à la Commission Consultative Paritaire des agents Contractuels (CCPC) de l’INRAE
L’ensemble des représentants du personnel ont voté contre les licenciements pour signaler les manquements évidents de l’institut vis-à-vis des deux personnels visés par le licenciement.
Une réunion ordinaire de la CCPC des agents contractuels devrait se tenir rapidement, entre autres pour discuter des décrets en cours de rédaction sur les « CDIs » de mission scientifique, les chaires juniors et les nouveaux contrats postdoctoraux.
Déclaration liminaire commune à la Commission Consultative Paritaire des agents Contractuels (CCPC) de l’INRAE - Réunion du 28 avril 2021
La CCPC, se tient pour la première fois depuis la création du nouvel institut fusionné INRAE pour statuer sur le licenciement de deux doctorant-e-s, en pleine crise sanitaire et sociale. Cette crise touche en particulier les plus précaires d’entre nous, y compris au sein de notre propre institut. Rappelons tout d’abord que nous sortons de deux décennies d’austérité, reconnue même par notre PDG, durant laquelle les effectifs titulaires de l’INRA ont fondu de près de 12%, avec une perte sèche de 1037 ETP entre 2000 et 2019. La précarité a, elle, explosé, avec une chute de 70% des recrutements externes, passant de 405 en 2002 à 133 en 2018 , et une multiplication par près de 5 des personnels sur convention de recherche, passant de 227 en 2004 à 1066 ETP en 2019. Cela représente 1986 personnes.
Nous sommes convoqué-e-s aujourd’hui pour constater du sort qui peut être réservé à ces précaires de la recherche. Ceux-ci ont une commission spécifique où l’on devrait aborder toutes leurs problématiques, si ce n’est y remédier. La CCPC ne s’est pas réunie en novembre dernier. Elle a failli à sa mission de rencontre annuelle a minima. N’aurait-on rien à se dire ?
Le licenciement des deux doctorant-e-s qui a poussé à la convocation de la CCPC aujourd’hui s’ajoute aux trois licenciements de doctorant-e-s qui ont eu lieu à l’INRA depuis 2012. Et quid des démissions d’ailleurs ? Encore une fois, ces ruptures de contrat font suite à des conflits entre les doctorant-e-s et leurs encadrant-e-s. Là où l’Institut pourrait et devrait prendre le relai, notamment par le biais de l’administration ou d’instances dédiées, la situation devient clairement inconfortable, si ce n’est ubuesque. 8 mois d’attente entre la décision de non réinscription en thèse et la mise en œuvre d’une commission disciplinaire pour l’une, 4 mois d’attente pour l’autre, sans source de revenu ! Un licenciement faisant suite, d’ailleurs, à une année de congé maladie. Les doctorant-e-s se retrouvent dans des situations intenables, qui se sont d’ailleurs souvent dégradées sur plusieurs mois sans grand moyen d’agir, où on les somme de partir sans leur offrir la possibilité de changer d’encadrement.
On le reconnait, ces situations sont la conséquence d’une recherche financée par la succession plus ou moins fructueuse de projets, financement qui favorise les sujets « sexy » et « tendance » au détriment d’une production scientifique de fond. À chaque projet, ses objectifs et ses résultats attendus. À chaque projet, ses précaires en charge de produire ces résultats et ses titulaires en charge d’encadrer les travaux. Et le nouveau décret renforce cette philosophie avec le nouveau contrat postdoctoral et le « CDI » de mission, où les objectifs et résultats doivent être définis dès la signature du contrat. Les doctorant-e-s deviennent les réceptacles finaux de cette pression à la production scientifique. En aurait-on oublié qu’ils et elles sont des chercheurs et chercheuses en formation ?
Nous continuons de revendiquer la mise en place de comités de médiation indépendants chargés d’évaluer les conditions de travail des doctorant-e-s, que ceux-ci pourraient saisir en cas de besoin en lien avec les CHSCT. Les comités de suivi scientifique ont démontré à chaque fois leur inefficacité à prévenir et gérer les conflits. Nous continuons également de revendiquer qu’il soit possible pour les doctorant-e-s en difficulté d’encadrement de saisir la CAP chercheurs afin de pouvoir redéfinir les conditions de poursuite de leur thèse. Tant que ces conditions ne seront pas mises en place, le risque que la CCPC soit à nouveau saisie pour statuer sur des licenciements de doctorant-e-s continuera.
En dehors même de ces situations extrêmes où on en arrive à la rupture de contrat, les obstacles au bon déroulement d’une thèse sont nombreux. Nous pourrions insister sur la nécessité de reconsidérer les délais dédiés au doctorat, - 3 ans c’est très court ! En attendant, la promesse de pouvoir rallonger la thèse de quelques mois pour pallier les périodes de confinement durant la pandémie n’a pas été respectée pour toute-s. Nombre de doctorant-e-s n’ont pas eu de financement, voire pas eu de réponse du tout à leur demande, sans qu’aucune justification n’ait été donnée de la part de l’Institut. En effet, les décisions prises par le gouvernement dans le cadre de l’état d’urgence, notamment le confinement, ont amplifié les tensions au sein des équipes qui de fait ne se voyaient plus. Nous revendiquons donc que tous les doctorantes et doctorants qui en ont fait la demande puissent bénéficier d’une prolongation de leur contrat, comme cela a été promis.
Cette question, avec celle des projets de décret sur les « CDIs » de mission, les chaires juniors et les nouveaux contrats postdoctoraux, devrait faire l’objet d’une CCPC dédiée. Nous réitérons à ce sujet notre revendication d’abrogation de la LPR qui amplifie la précarité. Les premiers projets de décret qui en sont issus concernant la mise en place des « CDIs » de mission, des chaires juniors et le nouveau contrat postdoctoral confirment totalement nos craintes. A minima, nous demandons à la direction générale de l’INRAE de ne pas mettre en place les « CDIs » de mission scientifique, ni les chaires juniors, qui n’ont d’intérêt ni pour les contractuels, ni pour l’Institut. A l’inverse, nous réclamons un vrai plan pluriannuel de créations d’emplois titulaires sous statut pour répondre aux besoins et à la hauteur des enjeux actuels.
Le cadre réglementaire de la commission donne lieu à une commission ordinaire annuelle, dont nous demandons la tenue dans les plus brefs délais.
1- Les recrutements externes incluent les recrutements de CR2/CR1 et ITA (dont recrutements spécifiques handicap) et contrats PACTE