Incompréhensible licenciement d’une chargée de recherche à l’INRAE

, par  Secrétariat SF , popularité : 22%

Que vaut la parole d’un PDG ?

Vous avez été nombreux à soutenir notre action de représentants du personnel (RP) l’année dernière pour défendre une jeune Chargée de Recherche recrutée sur poste handicap, victime d’un accident du travail, puis injustement licenciée en janvier 2021, contre l’avis de la Commission Administrative Paritaire des Chargés de Recherche (CAP des CR). Grâce aux nombreuses signatures de la pétition en faveur de son maintien dans l’institut (1500 signatures en une semaine), le PDG Philippe Mauguin nous avait accordé une entrevue le 22 janvier 2021 à l’issue de laquelle il s’était formellement engagé à lui accorder une nouvelle année probatoire sur un poste handicap CR ou IR, sans nouveau processus de sélection. Il confiait au DRH la charge de mettre en œuvre ce recrutement. Notre collègue, au chômage depuis janvier 2021, a eu confiance dans cet engagement fort et s’est pleinement investie dans cette voie plutôt que de contester juridiquement le non renouvellement de son contrat. Malgré les souffrances précédemment accumulées résultant de l’échec du premier recrutement et des tensions associées, puis de l’attente d’une décision la concernant, attente d’une durée incompréhensible (un an) révélant la légèreté avec laquelle la direction générale s’occupe des agents en situation difficile, elle a activement contribué à co-construire un projet de recrutement avec une unité, en accord avec la DRH. Contrairement aux engagements pris par la DG, le processus de recrutement, au bout de huit mois de co-construction (soit huit mois de chômage consacrés à cette perspective), s’est conclu par une procédure sélective que rien ne laissait prévoir. Ceci a profondément déstabilisé notre collègue lors de l’épreuve, ce qui l’a finalement écartée et a mis un terme définitif à un possible recrutement à l’INRAE.

L’ensemble de ces procédures (recrutement, licenciement, promesse de ré-intégration, refus final) aura duré plus de 3 ans, ruiné la santé physique et mentale de notre jeune collègue et hypothéqué sa vie professionnelle. Quand l’INRAE affiche des chartes sur la souffrance au travail et l’intégration des personnes en situation de handicap, il est légitime de s’interroger sur la valeur concrète de ces déclarations. Nous déplorons ce contraste entre les belles intentions proclamées et la réalité abrupte du traitement fait à une jeune CR en situation de handicap, reconnue par ses précédents travaux. Au-delà, chacun pourra s’interroger sur le sens du dialogue social dans un contexte où le PDG ne respecte même pas ses engagements oraux et écrits.

Au-delà du drame personnel de cette situation individuelle, nous souhaitons alerter sur la dérive de la gestion des ressources humaines de notre institut à laquelle nous assistons ces dernières années. La direction de l’INRAE a appliqué avec zèle l’esprit de la « loi de transformation de la fonction publique » en réduisant le rôle de vos représentants élus. Non seulement nous n’avons plus aucun rôle dans l’accompagnement et la résolution des situations difficiles, désormais pudiquement nommées « complexes », mais le seul rôle nous incombant encore, celui de siéger et voter lors des CAP, est à présent superbement ignoré par le PDG. En effet, pour cette collègue, et de façon tout à fait inédite dans l’histoire des CAP à l’INRAE, le PDG a prononcé une sanction plus grave que celle votée à la majorité des représentants du personnel et de l’administration en CAP sans même prendre la peine de justifier sa décision comme la loi l’y oblige. Ce mode de management autoritaire est en train de s’installer puisque le PDG a depuis récidivé et récemment prononcé la mise à la retraite d’office d’un de nos collègues contrairement à l’avis majoritaire de la CAP. Bien que le rôle de la CAP soit officiellement « consultatif », les PDG successifs de l’INRA ont toujours suivi l’avis final voté en CAP, même lorsque la sanction votée n’était pas conforme à celle réclamée par l’administration. Ce principe tacite donne leur raison d’être aux CAP. Si leur vote n’est plus suivi, les CAP ne sont plus qu’une mascarade.

Depuis trois ans, nous voyons se multiplier les procédures disciplinaires pour les agents, les commissions d’enquête administrative (CEAI), et les mises au placard qui s’enlisent. La Direction de l’INRAE a mis hors-jeu le rôle facilitateur des RP dans la gestion des situations difficiles et l’a remplacé par une structure administrative (la CASC) (1) qui laisse les agents seuls face au pouvoir hiérarchique de l’institut. Cela revient à nier l’efficacité de la médiation paritaire (administration + représentants élus) reconnue à tous les niveaux de l’institut et qui reposait sur l’expérience métiers des représentants en CAP. Suivant la même logique, la direction vient d’entériner l’existence des commissions d’enquête administrative (CEAI) qui donnent pleins pouvoirs à l’administration pour enquêter sur un agent et le conduire en CAP disciplinaire ou individuelle en fonction des résultats d’une enquête à sens unique, sans droit à la défense et à durée non encadrée.

L’ensemble de ces évolutions conduisent à gérer les « ressources » humaines selon une logique qui a fait des ravages dans de nombreuses entreprises publiques. L’INRAE s’engage ainsi brutalement sur une voie depuis longtemps dénoncée. Nous, représentants élus en CAP, restons mobilisés et engagés pour vous défendre, et nous continuons à suivre les agents en difficulté, en intersyndicale, en parallèle des dispositifs administratifs. Nous vous engageons donc à ne pas rester seuls face à l’administration/hiérarchie dans toute situation qui vous semble préjudiciable. Pour cela, n’hésitez pas à contacter au plus vite vos représentants CGT-CFDT-SUD en CAP (2-3), nous sommes là pour vous défendre !

1. CASC : la cellule d’accompagnement des situations complexes, rattachée aux RH, est constituée de 3 membres qui « gèrent » les situations de l’ensemble des agents, tous corps confondus.
2. Pour contacter vos représentants élus en CAP, contactez directement les syndicats qui vous donneront les noms et coordonnées de vos représentants pour la CAP de votre corps : cgt@inrae.fr ; cfdtinra@inrae.fr ; sudinrae@inrae.fr
3. Vos représentants du personnel en CAP CR INRAE : Nathalie Boissot (CFDT), Pascal Breil (SUD), Georges Carrel (SUD) Ahlem Filali (SUD), Sylvain Foissac (CGT), Virginie Galéote (CGT), Martine Pastuglia (CGT), Sandra Plancade (CGT), Sylvie Rabot (CFDT), Rémi Servien (CFDT).
Les experts en CAP CR INRAE : Isabelle Denis (CGT), Anne-Marie Le Coq (CFDT), Philippe Jatteau (SUD)

Voir en ligne : pétition