Conseil d’Administration INRA - 10 octobre 2019
Déclaration liminaire de la CGT.
« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs ». Cette phrase, que nous rappellent les médias, nous pourrions l’appliquer à notre institut face aux enjeux majeurs qu’il porte pour les années à venir. On n’a jamais eu autant besoin de la recherche pour effectuer les transitions de l’agriculture, pour avoir une alimentation saine, pour impulser la protection de l’environnement et pour s’adapter aux changements climatiques.
Nous avons maintenant la preuve que la fusion entre l’INRA et l’IRSTEA, faite dans la précipitation et sans réel dialogue social, sera une fusion "low cost". L’augmentation de la dotation des unités ex IRSTEA se fera par une diminution des dotations des unités INRA ou une baisse des dotations propres des départements. Les opérations de l’Université Paris-Saclay s’inscrivent aussi dans un processus de fusions à outrance accompagnées de politiques de site. Alors que la biodiversité mérite toutes les attentions, on nous annonce la fusion de l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS) avec l’Agence Française pour la Biodiversité qui, elle-même, ne s’est pas encore remise de la fusion, en 2017, entre l’ONEMA et l’établissement public des parcs nationaux entre autre. Pendant ce temps, l’INRA laisse dépérir le joyau botanique de la Villa Thuret, un site que nous envie le monde entier.
Nous nous réjouissons des constats énoncés dans le rapport du groupe de travail sur l’attractivité des emplois et des carrières scientifiques qui rejoignent ceux que la CGT-INRA dénoncent depuis longtemps. L’emploi scientifique diminue globalement et pas uniquement les emplois de personnels statutaires. C’est une destruction à la fois de l’emploi, mais aussi de la qualité de vie au travail. Cela aboutit à une précarisation accrue des emplois scientifiques illustrée par le refus de la direction de l’INRA de renouveler des CDD qui, de toutes les façons n’atteindraient pas les critères d’éligibilité au dispositif Sauvadet. C’est une attitude inhumaine, qui conduit à mettre à la rue des jeunes motivés, qui auraient toute leur place dans la fonction publique et qui savent montrer leur sens du bien commun.
Comment en sortir, alors que, le vote de la loi Dussopt, fin juillet 2019, introduit davantage de précarité encore ? C’est ce que pointe le conseil scientifique de l’institut écologie et environnement du CNRS qui exprime un avis défavorable aux propositions de répondre à la décroissance dramatique du nombre de postes de personnels permanents au CNRS par la diversification des formes de contractualisation (recrutement en CDI, libéralisation des contrats de chantier). Toutes ces évolutions ne feraient qu’augmenter la précarité et diminuer l’attractivité de l’emploi au CNRS.
De même, les solutions proposées par le groupe 1 sur le financement de la recherche vont détruire des pans entiers de la recherche en renforçant les inégalités, en donnant à ceux qui sont déjà grassement dotés et en appauvrissant là où la recherche est déjà exsangue. C’est ce qu’a produit l’ANR depuis plus de 10 ans. Faut-il des critères pour définir la « bonne recherche » ? Nous exigeons des budgets récurrents conséquents pour toutes les unités de recherche et nous demandons la fin des financements sur projets dont les montages font perdre trop de temps alors que les taux de rejet atteignent 90%. Ainsi, pour récolter 120 M€/an de projets, nos calculs montrent que l’INRA dépense entre 40 et 70 M€/an en masse salariale. Quelle perte d’énergie que nous aurions pu consacrer à la créativité !
Pour finir, il nous faut parler du rapport Delevoye qui prévoit une destruction du régime solidaire et inter-générationnel des retraites dont les conséquences seront catastrophiques pour tous les salariés. C’est une baisse de 20 à 30% des pensions de retraite des fonctionnaires qui est attendue alors que le système actuel, sans être complètement satisfaisant, conduit à un des taux de pauvreté des retraités les plus bas d’Europe et du Monde. Nous avons des propositions d’amélioration du système actuel en faisant participer, à leur juste contribution, les grands opérateurs du numérique et les entreprises du CAC40. De plus, nous revendiquons toujours un départ à la retraite à 60 ans et à taux plein. Avec le projet Delevoye, ce n’est plus l’Etat qui sera le seul garant des pensions de retraite mais elles seront soumises aux fluctuations financières et à la valeur du point.
Vers quel monde nous dirigeons-nous ?
Notre institut brûle, et nous regardons ailleurs… »